Free propose de fermer courant 2021 au moins 8 à 10 millions de lignes cuivre correspondant aux adresses où les quatre opérateurs sont présents en fibre depuis plus d’un an. En l’échange d’une stabilité du prix du dégroupage avec Orange.
La transition de l’adsl vers la fibre, un chantier de taille qui nécessitera une régulation adaptée à l’heure où Orange est en position de quasi-monopole sur le cuivre. La fin de cette technologie est déjà actée, l’opérateur historique prévoit d’arrêter la commercialisation de nouvelles lignes dans environ 3 ans puis procédera à l’arrêt du cuivre progressivement par plaque. En février dernier, l’Arcep a assurer “entendre jouer un rôle de garant de cette bascule, pour qu’elle ne se fasse pas au détriment des utilisateurs, tout en permettant au jeu concurrentiel très dynamique de continuer”.
Il s’agira pour le régulateur de “s’assurer que les différents opérateurs ont les bonnes incitations pour que la bascule se fasse dans un calendrier adapté et qu’aucun utilisateur ne soit laissé de côté”, a t-il fait savoir. La régulation des marchés fixe des prochaines années est donc un sujet épineux dont les enjeux sont importants. Après avoir lancé une consultation en début d’année, l’Arcep a dévoilé la semaine dernière les réponses des opérateurs nationaux, alternatifs mais aussi d’infrastructure sur son projet dévolution de régulation sur la période 2020-2023.
De son côté, Free le répète, “cette transition est une vallée de la mort. Pour toute rupture technologique, il faut réinventer l’outil de production, les produits, les processus et les services. Surtout, il faut financer sur fonds privés plusieurs dizaines de milliards.”
La question n’est plus de savoir si la fibre va être déployée, mais de savoir combien d’acteurs resteront debout après cette bascule. Pour l’opérateur, “le secteur n’est clairement pas assez riche pour maintenir en exploitation deux boucles locales cuivre et optique partiellement concurrentes”, de nombreux actifs réseaux ont d’ailleurs déjà été vendus par les opérateurs alternatifs.
Dans ce contexte, le FAI met en exergue deux objectifs à fixer. Le premier, “réussir la transition vers la fibre ; uniformiser les conditions de cofinancement et d’accès sur le territoire mais aussi assurer une résilience, une qualité de service et une diversité d’usage répondant aux besoins sur le long terme”.
Le second est de maitriser “le poids économique du cuivre en voie d’obsolescence” et inciter économiquement Orange à stopper la commercialisation de nouveaux accès cuivre là où c’est possible. Le tout en permettant aux opérateurs de maitriser la qualité de service cuivre de leurs abonnés et les coûts associés.
“Une stabilité du prix du dégroupage contre une trajectoire de fermeture commerciale”
Sur l’extinction du cuivre, Free n’en démord pas, “l’intérêt particulier de l’opérateur historique diverge objectivement de l’intérêt général. Le levier d’incitation économique doit être utilisé par l’Autorité”.
De son côté, Orange souhaite depuis de nombreux mois une augmentation du prix du cuivre pour inciter à basculer vers la fibre, alors que Free, Bouygues et SFR ont milité en février dernier pour une baisse, soutenus par le président de l’Arcep.
Dans sa réponse à la consultation, Free peaufine son approche et propose aujourd’hui de négocier “une stabilité du prix du dégroupage contre une trajectoire de fermeture commerciale”, c’est-à-dire la non commercialisation de nouveaux accès cuivre, sur 10 millions de prises à horizon 18 mois, où les opérateurs nationaux sont présents en FttH.
L’opérateur milite également pour une clause de revoyure à cette échéance qui pourrait permettre, en cas de non-respect, de mettre en place “des incitations tarifaires et une baisse drastique du prix du dégroupage”. C’est aujourd’hui une évidence pour Free, une tarification du cuivre en coûts incrémentaux de court terme pour les immeubles dans lesquels quatre opérateurs FttH sont présents, inciterait Orange à y fermer rapidement le cuivre.”
Arrêter la commercialisation du cuivre à la maille de l’immeuble pour les logements éligibles à la fibre
Si la maison-mère de Free partage pour l’essentiel les orientations présentées par l’Arcep, elle souhaite que “le scénario d’extinction commerciale du cuivre soit plus volontariste et à la maille de l’immeuble”. Si celle-ci est plus large (point de mutualisation), le scénario de fermeture “ne pourra qu’être poussif”, puisque la complétude effective du déploiement n’est quasiment jamais atteint à une maille supérieure à l’adresse, explique t-il.
Fermer commercialement le cuivre au plus vite et sur le plus grand nombre de logements éligibles à la fibre, est une donc nécessité pour Free. Mais cela sera parfois douloureux, prévient-il puisqu’il s’agira de couper des accès. “Sur la clientèle résidentielle, les services cuivre sont raisonnablement substituables sur fibre. En revanche, la fermeture du cuivre révèlera les cas où les travaux de raccordement final sont complexes, notamment à l’intérieur de la propriété privée”, indique-t-il. Tirer un fourreau dans le jardin, des goulottes dans un appartement, tant de dépenses qui seront “difficilement supportables par certains ménages”, l’opérateur de Xavier Niel recommande la mise en place de “mécanismes d’aides ou de solidarité”.
Pour minimiser ces dépenses futures, il est urgent pour l’opérateur d’arrêter la commercialisation du cuivre en 2020 pour la clientèle résidentielle, en particulier “pour les 8 millions de logements FttH où les quatre principaux opérateurs sont simultanément présents.” Car dans le cas où un seul opérateur fournit du cuivre aux abonnés emménageant dans un logement éligible à la fibre, “il détruit la disposition à payer des propriétaires pour réaliser les travaux permettant le fibrage de leur logement”.