La 5G est sur toutes les lèvres. Mais qu’apporte-t-elle vraiment en termes d’améliorations, et surtout d’usages pour l’utilisateur ? Cette technologie deviendra une réalité en France courant 2020, alors que d’autres pays se sont déjà lancés. Sommes-nous vraiment en retard ? Bleu122, agence spécialisée dans la création d’applications pour d’autres entreprises et dont nous présentions récemment une infographie comparant la 4G et la 5G, nous apporte des éclaircissement sur cette nouvelle technologie.
1/ Avec la 5G, on promet une forte hausse des débits, ainsi qu’une baisse de la latence. Pouvez-vous nous donner un ordre d’idée ?
La 4G permettait un débit théorique de l’ordre de 200 Mbit/s. Avec la 5G, on peut monter à 10 Gbit/s pour des usages qui nécessitent beaucoup de données.
Pour d’autres usages, la 5G peut favoriser la latence. En effet, certaines utilisations comme les opérations à distance ou les voitures autonomes demandent une latence faible, sans forcément avoir besoin de beaucoup de bande passante.
2/ Comment s’expliquer, dans les grandes lignes, cette forte hausse des débits ?
Trois innovations de la 5G permettent cette hausse des débits.
– Le beamforming, qui permet de concentrer l’émission des données vers l’utilisateur (un peu comme le faisceau d’un phare), alors que la 4G émettait dans toutes les directions.
– Un nombre d’antennes plus élevé au sein même de chaque antenne relais.
– La possibilité pour le téléphone d’émettre et de recevoir des donnés en même temps.
3/ La 5G promet également plus de sécurité. Pouvez-vous nous apporter quelques précisions à ce sujet ?
La 5G n’apporte pas en soit de changement particulier par rapport à la sécurité. Cependant, les nouveaux usages qui vont apparaître représentent de nouveaux défis (voiture connectée, par exemple) et demandent une attention particulière. Sur le plan technique, la 5G permet la virtualisation des équipements via le standard SDN, c’est-à-dire que l’infrastructure réseau entière peut être contrôlée et modifiée à distance de façon automatique sans intervenir individuellement sur les différents équipements du réseau. Ainsi, que ce soit en cas d’attaque ou pour une simple opération de maintenance, les actions à réaliser sont plus simples. Cela permet aussi de rendre l’infrastructure plus «scalable». Imaginons qu’un soir de match beaucoup de monde regarde la télévision en direct, la 5G permettra alors d’adapter l’infrastructure réseau aux besoins de façon momentanée.
4/ On évoque par ailleurs une consommation énergétique moindre et donc une meilleure autonomie pour les appareils mobiles. Comment cela est-il possible ?
Le déploiement de la 5G se fera notamment via l’utilisation de «SmallCells». Ces SmallCells sont des antennes de faible portée (de l’ordre de quelques centaines de mètres), qui seront placées de manière plus dense qu’en 4G. De ce fait, nos smartphones utiliseront moins d’énergie pour communiquer avec des antennes plus proches. Les émissions des ondes radio sont donc aussi réduites, car notre téléphone émettra à une puissance plus réduite pour communiquer avec une antenne plus proche qu’une plus éloignée. Pour les objets connectés, une partie du spectre 5G leur est réservée. Ils peuvent ainsi communiquer à un débit faible en consommant très peu d’énergie.
5/ On parle de smartphones 5G. Mais la technologie servira également à la maison connectée et à la ville intelligente. Pouvez-vous nous citer quelques exemples concrets ?
Les utilisations dans le cadre de la maison /ville intelligente sont variés : places de parking connectés, lampadaires qui s’allument au bon moment… La gestion du trafic autoroutier est aussi primordiale. Comme la 5G permettra à un grand nombre d’appareils de communiquer entre eux, on peut imaginer que les GPS des voitures pourront répartir le trafic de manière optimale. La 5G permettant de communiquer via un mode bas débit basse consommation, un objet connecté pourra demain utiliser un module 5G, car il n’impactera que peu ses performances énergétiques.
6/ En parlant de la maison, c’est la possibilité de remplacer les technologies terrestres (ADSL et fibre optique) par une technologie mobile, pour l’accès au très haut débit. Quelle proportion de foyers pourrait, selon vous, envisager une telle alternative ?
Globalement; toute la France sera fibrée aux alentours de 2022, du fait notamment des subventions de l’État. Le déploiement de la 5G sur tout le territoire prendra lui plus de temps. Au vu des investissements sur l’infrastructure fibre, les opérateurs feront tout pour empêcher cet usage de la 5G qui rendrait la fibre redondante. Il ne faut aussi pas oublier qu’une antenne 5G est forcément reliée à une ligne fibre pour communiquer sur Internet. La 5G permet donc aux mobiles de profiter d’un débit similaire à la fibre sans connexion physique, mais pas de la remplacer.
7/ On parle de téléviseur 5G. La connectivité permettrait le streaming et le téléchargement des contenus, mais aussi le remplacement de la box Internet. Pensez-vous que c’est l’avenir du téléviseur, souvent vu comment un élément central de la maison ?
Les plates-formes de streaming comme Netflix, HBO ou YouTube posent de nouveaux défis en termes d’infrastructure. Netflix représente 15 % du trafic Internet mondial et est en augmentation constante. Avec la démocratisation du streaming en 4K et l’arrivée prochaine de la 8K, un accès 5G sur un téléviseur permettrait de désengorger les lignes traditionnelles.
8/ Au-delà des usages grand public, la 5G s’annonce prometteuse pour l’industrie. Avez-vous quelques exemples de nouveaux usages ?
L’industrie subie la quatrième grande transformation de l’histoire. On parle d’industrie 4.0. Connecter chaque équipement peut permettre la captation de donnés en temps réel qui peuvent ensuite être traitées, notamment pour réaliser de la maintenance prédictive. La connectivité 5G permettant de remonter un volume massif de données. Lorsqu’un composant sur une machine commence à mal fonctionner, des algorithmes de maintenance prédictive peuvent déterminer qu’une casse va survenir. Cette prédiction est réalisée avant la panne, et on peut donc prévoir une maintenance courte qui limitera la perte de production.
9/ On a un débat entre les acteurs concernant la 6G, certains souhaitant une évolution de la 5G et d’autres une arrivée plus tardive avec une rupture technologique plus nette. Quel est votre avis sur la question ?
Les fabricants d’antennes et de smartphones lancent tout juste les premiers laboratoires d’études sur la 6G qui doivent déterminer quelles seront les innovations de la 6G. Cette technologie sera sûrement déployée à l’horizon 2030, et il est donc trop tôt pour avoir un avis concret sur la question. L’arrivée des smartphones ont engendré de nouveaux besoins (streaming vidéo en haute définition, notamment) qui ont demandé une mise en place de la 4G. Dans le futur, l’arrivée de nouveaux terminaux pourraient rendre un potentiel réseau 6G nécessaire. Sur le plan politique, les réseaux mobiles sont devenus un enjeu crucial, un peu comme la course à l’espace dans les années 60-70. Le président Trump a récemment demandé l’arrivée de la 6G «le plus vite possible». En réalité, la 6G n’est même pas encore spécifiée et la partie standardisation ne sera pas terminée avant 2025-2028.
10/ La 5G doit faire ses premiers pas en France courant 2020, alors qu’elle est déjà une réalité en Asie. Sommes-nous vraiment en retard ?
La Chine et les États-Unis sont les deux seuls pays où la 5G a réellement commencé à être déployée. Pour la Chine, la 5G est un enjeu crucial. Elle comporte plus de 700 millions d’utilisateurs mobiles. Pour éviter la congestion, la 5G est vraiment nécessaire. Pour les pays d’Europe à la démographie moins dynamique (75 millions d’abonnements mobiles en France) l’enjeu est plus faible. La 5G est naturellement en cours de déploiement à Chongqing, en Chine, ville la plus peuplée du monde. Elle comporte à elle seule presque autant d’habitants que la moitié de la France. On comprend donc l’intérêt de déployer la 5G. En France, nous n’en somment pas encore là. L’attribution des fréquences par l’État (Arcep) n’aura lieu que début 2020. Les opérateurs pourront ensuite commencer à déployer leurs réseaux. Le gouvernement français s’est fixé comme objectif de couvrir au moins une grande ville en 2020 et les principaux axes de transport d’ici 2025, là où les États-Unis prévoient 190 millions de connexions en 2025. En France, les plages de fréquences 5G sont parfois déjà requises pour d’autres utilisations. Ces erreurs se sont déjà produites lors du déploiement 4G. La mort de la TNT, progressivement remplacée par l’IPTV, devrait permettre de récupérer une partie du spectre pour la 5G.
11/ Cette arrivée plus tardive pourrait-elle s’avérer pénalisante sur le long terme ?
Tout à fait. Les opérateurs Français ne connaissant pas encore la durée de validité et le coût des licences, (les opérateurs achètent les licences à l’État). L’État Français va vendre les fréquences 5G aux enchères, ce qui risque d’impacter négativement le budget des opérateurs dédié aux infrastructures.
Dans d’autres pays d’Europe, les licences sont moins chères et ont déjà été attribuées. Comme l’Internet des objets est en train de devenir un pilier économique (1600 milliards d’euros dans le monde en 2019), les industriels iront s’installer là où les infrastructures sont déjà déployées.
12/ Concernant les forfaits mobiles, la 5G pourrait-elle sonner la fin des quotas avec l’illimité qui deviendrait alors la norme ?
Plusieurs opérateurs américains et coréens proposent déjà des forfaits illimités en 5G. Mais les opérateurs cherchent des moyens pour continuer à vendre des options payantes, comme une latence faible pour les utilisateurs voulant utiliser la 5G pour jouer en ligne.