France Télévisions répond aux critiques de TF1 et consorts, “une agression caractérisée contre le service public”

Après un courrier envoyé au gouvernement la semaine dernière par l’Association des chaînes privées (ACP) réunissant TF1, M6, Canal+ et Altice (BFM, RMC) critiquant le traitement du groupe d’audiovisuel public, sa présidente, Delphine Ernotte, répond.

Une missive à charge dénonçant les “avantages compétitifs” dont bénéficierait le groupe France Télévisions a été transmise à Elisabeth Borne de la part des principales chaînes privées françaises. Considérant que TF1 et consorts “se trompent d’époque et de combat”, Delphine Ernotte s’est attelée à répondre aux critiques dans une interview pour le Figaro.

Pour elle, la stratégie mise en place depuis 2018 a rendu “fébriles” ces acteurs privés et les a poussés à faire des critiques infondées. “Nous sommes devenus plus puissants en nous renforçant sur l’information, sur la création française, pas en allant sur le terrain de jeu des acteurs privés. Jamais l’écart n’a été aussi faible parce que jamais nos offres n’ont été aussi éloignées et différentes” affirme-t-elle. Si Canal+ et les autres chaînes “ne manquent pas d’argent“, ils ont subi une concurrence très forte des plateformes sur les formats étrangers et des Gafa sur la publicité, une situation qui n’est pas celle de France Télévisions, car son “offre est essentiellement française et non commerciale. C’est pour cela que, depuis 2015, je plaide pour une alliance entre privés et publics. Ensemble et différents, nous sommes plus forts.

Sur la forme, le courrier a suscité “énormément d’émoi et un grand sentiment d’injustice chez les salariés” explique la présidente. Elle trouve le courrier “terriblement XXe siècle. Leur principal concurrent, ce n’est évidemment plus France 2, mais Netflix, Amazon, YouTube ! Sur la forme, l’élégance élémentaire de ces messieurs aurait pu être de me passer un coup de fil“. Loin d’une logique de conflit entre les deux secteurs de l’audiovisuel, elle rappelle par ailleurs avoir soutenu la fusion entre TF1 et M6. Elle ironise, assurant avoir reçu à l’époque “beaucoup d’appels. Ils ont dû perdre mon numéro depuis…“.

Sur le fond, elle tient à débunker les accusations d’arrangement avec les missions du service public. L’ACP accusait en effet le groupe de développer une programmation étonnamment commerciale sur ses grandes chaînes, en particulier sur France 2 » et entraine « une sous-exposition des œuvres et programmes relevant de ses missions de service public ». Ces programmes en question finissent ainsi, selon les chaînes, sur des chaînes moins visionnées comme France 4, Culture Box ou sur la plateforme numérique du groupe. Pour Delphine Ernotte, “c’est factuellement faux“. Elle cite en exemple le soutien de France Télévisions à 22 films sélectionnés à Cannes contre 0 pour les chaînes privées gratuites. Et de préciser que “depuis dix ans, nous sommes toujours les seuls à exposer le spectacle vivant, y compris en prime time. Depuis 2017, nous avons divisé par deux le volume de nos séries policières. Nous ne diffusons plus aucune série américaine quand elles représentent entre 50 % et 90 % sur les privées. Une anecdote: nous avons regardé le programme télé du 10 mai, jour de l’attaque des chaînes privées. France 2 diffusait une fiction française sur le harcèlement, France 3 un documentaire historique, France 5 «La Grande Librairie» et Culturebox un concert. En face, sur les antennes du groupe TF1, vous aviez deux séries américaines, un jeu et de la téléréalité. Cette différence, elle est visible tous les jours.”

D’autres critiques ont été faites, notamment en terme “d’asymétrie juridiques”, mais pour Delphine Ernotte il s’agit d’une tentative d’obliger le groupe à réduire ses investissemetns pour faire baisser les audiences des fictions qu’il produit. ” C’est une vraie menace pour tous les créateurs. Pour le reste, nos obligations sont beaucoup plus strictes que celles des chaînes privées et sont scrupuleusement observées par l’Arcom. Notre cahier des charges a été fixé par l’État. Il est exigeant et entièrement respecté” explique-t-elle. Le gouvernement est par ailleurs favorable à la stratégie mise en place par France Télévisions selon sa présidente : “il veut un audiovisuel public fort” et la stratégie décidée par l’État en 2018 a entrainé des économies importantes et un renforcement des missions du groupe, avec des résultats positifs à la clé.

Elle reconnait par ailleurs que la baisse du marché publicitaire télé au premier trimestre est source de tensions. Mais veut rappeler aux chaînes qu’elles sont “dans la même équipe, celle des médias traditionnels, face aux géants du streaming et aux réseaux sociaux.”

 

 

 

 

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